Planète vagabonde

J'ai pris forme dans l'univers, et je me suis posé ici, sur la planète bleue.
Ai-je été dérouté par quelque malencontre, abusé par quelque illusion?
Car dans le repos ou l'exaltation, surgissent
d'autres images, d'autres sentiments, d'autres espaces, d'autres élans,
qui m'apportent, fugitifs et émus, les parfums d'un ailleurs souvenu.

Je chevauche l'ici et l'ailleurs.
Tout de l'ici m'est plus étrange que l'ailleurs.
L'ici est submergé de clameurs et de stupéfactions;
l'ailleurs s'irrigue d'amitié, scintille d'enthousiasme,
s'enveloppe de silence, et patiente à l'infini.

L'ailleurs et l'ici ont rendez-vous dans un havre intime et secret.

vendredi 16 mars 2007

La vie sauve

Dans les premières années de mon enfance, j'ai par deux fois échappé de justesse à une mort violente, et chaque fois les circonstances étaient semblables. Je ne me souviens pas quelles émotions j'ai pu éprouver à ces moments, mais j'ai dû en éprouver, puisqu'il me reste quelques images de ces événements.

La première fois, revenant avec mon frère des bords de la rivière qui passait près de notre maison, je me suis mis soudainement à descendre en courant la levée, et me suis arrêté net au bord de la route: une voiture lancée à pleine vitesse est passée juste devant moi.

La seconde fois, j'ai franchi le portail de la maison en courant et me suis arrêté net au bord du trottoir: un camion à benne qui descendait la rue a freiné à mort, et je me souviens avoir vu ses roues arrière heurter le trottoir d'en face puis le trottoir de mon côté. La voisine d'en face et le chauffeur du camion m'ont interpellé, mais je ne me souviens pas des mots qu'ils m'ont adressés.

Par deux fois donc, j'ai été sauvé d'une mort certaine.

Quelqu'un, peut-être un médium, m'a dit un jour que je bénéficiais d'une protection “surnaturelle”; au souvenir de ces deux événements, je suis porté à le croire, et me sens rempli de gratitude et en toute sécurité.

S'il est vrai que dans un monde autre des êtres veillent sur moi, je veux répondre à leur amitié. Je suis prêt pour tout ce qu'ils peuvent attendre de moi.

mercredi 14 mars 2007

Kannon et Kinjika

Daien-in Kannon, Mt Kôya, Japon . Kinjika 金鹿
Kannon, au temple Daien-in (Mt Kôya, Japon)
大圓院の観音(高野山)


Merci à Jpatokal et Wikipédia
pour le sourire paisible et lumineux de
Kannon - Avalokiteshvara.
. Le Cerf Doré,
gardien lumineux et bienveillant


「kinjika」は私の心の守り神です。
金の鹿は輝いていて好意的な神です。

mardi 13 mars 2007

Médium

Voici ce que m'a dit le médium, et l'inspiration que j'en retire:

“Je marche à grandes enjambées, droit devant, car j'aurai toujours toute ma vie à vivre.

Je suis confiant, c'est-à-dire que je suis en parfait accord avec moi-même, avec le monde-autre, avec toute la vie.

Je ne regarde pas en arrière, car le passé est passé.

Je ne doute pas, pour que rien ne se perde.

Je suis mon instinct, mon intuition, mon imagination, ma folie.

La vie me munit de beaucoup d'outils pour aller de l'avant.

Elle me plonge une épée dans le front, m'enfonce une épée dans la poitrine: la vie ouvre tous mes canaux..

En haut, un autre moi-même me hisse vers lui; en bas, un autre moi-même me demande de le hisser vers moi.

J'offre tout ce que m'offre la vie; je suis son médium consentant.

Car la vie est belle, la vie vaut d'être vécue.”

jeudi 8 mars 2007

La Voix

Charles Baudelaire, Les Épaves (1866), XVII - La Voix.

Source: FleursDuMal.org

La Voix

Mon berceau s'adossait à la bibliothèque,
Babel sombre, où roman, science, fabliau,
Tout, la cendre latine et la poussière grecque,
Se mêlaient. J'étais haut comme un in-folio.
Deux voix me parlaient. L'une, insidieuse et ferme,
Disait: “La Terre est un gâteau plein de douceur;
Je puis (et ton plaisir serait alors sans terme!)
Te faire un appétit d'une égale grosseur.”
Et l'autre: “Viens! oh! viens voyager dans les rêves,
Au delà du possible, au delà du connu!”
Et celle-là chantait comme le vent des grèves,
Fantôme vagissant, on ne sait d'où venu,
Qui caresse l'oreille et cependant l'effraie.
Je te répondis: “Oui! douce voix!” C'est d'alors
Que date ce qu'on peut, hélas! nommer ma plaie
Et ma fatalité. Derrière les décors
De l'existence immense, au plus noir de l'abîme,
Je vois distinctement des mondes singuliers,
Et, de ma clairvoyance extatique victime,
Je traîne des serpents qui mordent mes souliers.
Et c'est depuis ce temps que, pareil aux prophètes,
J'aime si tendrement le désert et la mer;
Que je ris dans les deuils et pleure dans les fêtes,
Et trouve un goût suave au vin le plus amer;
Que je prends très souvent les faits pour des mensonges,
Et que, les yeux au ciel, je tombe dans des trous.
Mais la voix me console et dit: “Garde tes songes:
Les sages n'en ont pas d'aussi beaux que les fous!”

vendredi 2 mars 2007

L'affection fraternelle

Estienne de la Boëtie (1530-1563): Discours de la Servitude Volontaire.

Mais certes s’il y a rien de clair ni d’apparent en la nature, et ou il ne soit pas permis de faire l’aveugle, c’est cela, que la nature, la ministre de dieu, la gouvernante des hommes nous a tous faits de mesme forme, et comme il semble, a mesme moule, afin de nous entreconnoistre tous pour compaignons ou plustost pour frères.
Et si faisans les partages des présens qu’elle nous faisoit, elle a fait quelque avantage de son bien soit au corps ou en l’esprit aus uns plus qu’aus autres; si n’a elle pourtant entendu nous mettre en ce monde, comme dans un camp clos, et n’a pas envoié icy bas les plus forts ny les plus avisez comme des brigans armez dans une forest pour y gourmander les plus foibles, mais plustost faut il croire que faisant ainsi les parts aus uns plus grandes, aus autres plus petites, elle vouloit faire place a la fraternelle affection, afin qu’elle eut ou s’emploier, aians les uns puissance de donner aide, les autres besoin d’en recevoir, puis doncques que ceste bonne mere nous a donne a tous toute la terre pour demeure, nous a tous logés aucunement en mesme maison, nous a tous figurés a même patron afin que chacun se peust mirer et quasi reconnoistre l’un dans l’autre; si elle nous a donné a tous ce grand present de la voix et de la parolle pour nous accointer et fraterniser davantage, et faire par la commune et mutuelle declaration de nos pensées une communion de nos volontes; et si elle a tasché par tous moiens de serrer et estreindre si fort le noeud de nostre alliance et société; si elle a monstré en toutes choses qu’elle ne vouloit pas tant nous faire tous unis que tous uns: il ne faut pas faire doute que nous ne soions tous naturellement libres, puis que nous sommes tous compaignons; et ne peut tomber en l’entendement de personne que nature ait mis aucun en servitude nous aiant tous mis en compaignie.